L’A2P part du principe que le travail est aussi naturel à l’homme que la sexualité ou la vie en société.
Tellement naturel que l’absence de travail est une souffrance, comme en témoignent les exclus (du moins ceux que l’exclusion n’a pas fait sombrer dans la déchéance psychique). Le travail comme activité naturelle est un point de vue délibérément anthropologique qui entre en franche opposition avec le point de vue philosophico–religieux qui imprègne notre société occidentale.
Les premiers gestes de l’enfant avant même qu’il « comprenne » correctement le monde sont des gestes d’action. Les gestes d’action sont l’expression d’un besoin naturel, et ce besoin naturel prend sa source dans une angoisse existentielle qui s’installe dès la naissance à cause de l’apparition de la conscience : l’enfant se perçoit de plus en plus lucidement comme en train de vivre et sa conscience lui impose cette question lancinante : « quoi faire de la vie ? »
On ne procure pas des activités aux jeunes enfants pour les distraire mais pour les arracher à l’angoisse.
L’enfant cherche sa raison d’être.
Dans un premier temps, il trouvera une réponse dans l’amour parental qui lui révélera qu’il a été voulu, donc que son existence a d’abord un sens extérieur : il est l’objet produit par l’amour des parents. Cela permet le dépôt de l’angoisse en attendant …de grandir.
Car le véritable acte qui résout l’angoisse, c’est un acte transformateur. Il faut que l’action déployée parvienne à changer quelque chose dans l’environnement pour que naisse un sentiment d’être qui soit satisfaisant.
C’est par le jeu que l’enfant découvre l’occasion et le moyen de changer le monde, fournissant ainsi un sens à la vie.
Le travail, en tant qu’activité, le besoin de travail en tant que motivation naturelle de l’être humain, ne sont que des applications adultes de l’activité de jeu et du besoin de jeu. L’homme travaille parce qu’il a découvert que la transformation du monde extérieur est la capacité spécifique de l’être humain et que cette découverte, née du Jeu, donne un sens à sa vie.
Tout ce qui se fabrique est le résultat d’un travail et le travail n’est nullement une obligation mais l’expression d’une intention, l’intention de transformer le monde selon une certaine fantasmatique. Le travail d’un individu c’est donc la projection en des gestes opératoires du genre de transformation du monde dont il éprouve le besoin, et par conséquent dont il se sent capable. D’où la notion de Besoin/Capacité.
L’individu vient au monde avec un besoin/capacité de transformation du monde tel qu’il résulte du combat contre l’angoisse primitive et tel qu’il a été façonné par les pulsions singulières du « Ça » qu’il avait en lui quand il est venu au monde, une pulsion de transformation du monde.
L’habileté naturelle d’un individu face aux situations de travail n’est pas seulement un compartiment de ses aptitudes techniques à traiter les choses de la vie matérielle en général, mais un pan de sa personnalité globale. Nous parlons donc de personnalité professionnelle. La personnalité professionnelle est le type de contribution que l’individu porte en lui de façon innée. C’est ce type de contribution qu’il importerait de déceler. C’est ce que propose l’indicateur typologique de la Personnalité Professionnelle.
Source :« La personnalité Professionnelle » Tome 1 – Robert Jourda 2001 et 2016